Souvenez vous! Il y a quelques temps déjà je m'emballais pour le projet du centre Pompidou mobile: un concept qui mettait au coeur du projet l'ouverture de l'art à un public élargi. Plutôt que de laisser des oeuvres dormir dans ses réserves de Beaubourg, il s'agissait d'embarquer dans un voyage où à chaque destination on installerait un chapiteau pour que les visiteurs viennent admirer, ou non d'ailleurs, les installations , peintures, sculptures... Rendre l'art plus accessible , populaire, un projet qui ne pouvait que me plaire! Alors je suis allée enquêter sur place...
L'architecture à la drôle de forme de cirque ambulant tient ses promesses... Ludique, colorée, séductrice... un aspect de fête foraine qui donne à un art taxer à tort d'élitiste une image plus populaire. De quoi susciter la curiosité et donner envie aux habitants du quartier de Caucriauville de pousser les portes du chapiteau. La ville du Havre s'est d'ailleurs investie dans ce projet social et artistique, en proposant des ateliers, un espace de bibliothèque gratuite, et le MOMA (un lieu que j'adore) a contribuer à l'exposition en prêtant l'une des oeuvres de François Morellet issue de ses collections.
A l'intérieur, même les casiers (vestiaires) sont dans l'esprit et annonce la thématique de l'exposition: Cercles et carrés.
Ce thème, une idée simple mais efficace qui permet de retracer toute l'histoire de l'art du XXe : débuts de l'art abstrait, ready-made, installations minimalistes... Des noms prestigieux pour une sélection exigeante... chaque oeuvre exposée représente une période artistique: Kupka, Duchamp, Léger, Kandinsky, Van Doesburg, Bill, Albers, Morellet, Soto, Andre, Flavin, Buren, Richter: diversité et qualité!
Le parcours est clair et la brochure très complète permet de construire des ponts entre les diverses oeuvres tout en apprenant aussi sur chaque artiste grâce aux biographies, l'idée qui les guide pour créer. Les formes géométriques expriment alors divers sentiments, font voyager dans plusieurs univers... oniriques, cosmiques, scientifiques, musicaux, urbains, industriels, .... Non ce ne sont pas juste des formes géométriques apposés au hasard. Jeu de couleurs, composition, humour ou poésie... chaque oeuvre permet au visiteur de découvrir une autre facette de l'art moderne.
Vassily Kandinsky, Sur les pointes, 1928
Fernand Léger, Le pont du remorqueur, 1920
Marcel Duchamp, Roue de bicyclette, 1913/1964
A partir de Duchamp, on quite la partie 2D pour pénétrer dans le monde déconcertant de l'art de l'installation. Jouant avec les visiteurs les artistes s'affranchissent des codes pour ne garder que l'essence: la matière. En habituée des musées, il était intéressant pour moi de redécouvrir certains artistes dans ce contexte non formel d'une toile de tente. L'alchimie entre les lumières de Dan Flavin et les carrés en étain de Carl andré était magique. Pour les accompagner, une vidéo de Hans Richter, hypnotique, était projetée en face. Les enfants présents s'appropriant l'espace n'hésitaient d'ailleurs pas à s'assoir sur les 144 carrés pour regarder les carrés et rectangles apparaître et disparaître sur l'écran.
Dan Flavin, Sans titre (Donna) 5a, 1971
Carl Andre, 144 carrés d'étain, 1975
Daniel Buren, Photo-souvenir: Cabane éclatée n°6, 1985
Je suis totalement conquise par ce projet novateur qui rend l'art accessible à tous et permet de créer des liens d'abord émotionnels avec les oeuvres avant de donner des pistes réflexives sur chacune d'entre elles. En effet, il faudrait d'abord ressentir l'art avant de l'analyser... on a tendance à oublier l'importance que revêt le plaisir esthétique!
Un grand bravo au centre pompidou mobile!